Vis ma vie de suiveur sur l’UTMB

L’UTMB Inside, acte 3. Cette fois-ci dans les pas de Jérémy. Son rôle à Chamonix, début septembre : assistant, tout simplement. Un costume partagé avec Max’, entre autres. Une sacrée doublette…

La préparation du week-end

Nul n’est sans savoir qu’un ultra, ça se prépare. Il n’y a bien qu’un seul mec capable de s’aligner sur un 100 km avec une préparation plus « light » que jamais. Un nom ? Bon, OK, ce mec fait partie de 100% Trail Angers… Mais, ce n’est pas une raison pour suivre l’exemple de Benjamin ! (Etait-ce vraiment utile de le citer ?). Je vais donc faire les choses bien et préparer un minimum cette aventure, désormais appelée : LE SUIVI DE L’UTMB®.
Là, comme ça, je vois deux intérêts à faire ce travail préliminaire : me mettre dans l’ambiance, et me divertir pendant les vacances. Parce qu’il faut dire qu’elle tombe bien cette course, juste avant la rentrée scolaire. Cette course ? Plutôt ces courses… Six courses sur cinq jours à travers trois pays. Aïe ! Une équation tout sauf simple. D’où ma volonté d’être prêt. De A à Z.

« Il faudra faire des impasses »

Du coup, je me mets à lire la bible de l’accompagnateur – la fameux « Guide de Mobilité » – de long en large. Je questionne les coureurs pour connaitre leurs prévisions de course. J’échange avec mon acolyte, Max, pour fixer nos priorités dans le suivi. Une équation tout sauf simple. Il faudra donc faire des impasses, qu’on le veuille ou non. Plus le temps passe, et plus je me prends au jeu. Plus le temps passe, et plus j’ai hâte d’y être. Plus le passe, et plus je me dis que cette aventure va être inoubliable.
Le résultat de tout ça est à la hauteur de la complexité du problème proposé par 100% Trail Angers : « Comment suivre cinq coureurs sur trois courses pendant quatre jours à travers trois pays ? » . Certains diront qu’ils ont vomi en voulant décrypter ce schéma ci-joint, d’autres y verront l’œuvre d’un visionnaire. Je vous laisse en juger par vous-même…

Le plan de route du duo Max’-Jérem’

L’arrivée à Chamonix

Le trajet de Paris à Chamonix se fait en voiture, accompagné de Benoît et Benjamin. L’ambiance est détendue. Inutile de préciser que 95 % des discussions tournent autour de lévénement qui approche à grands pas. Mais tout le monde est dans le même état d’esprit : « c’est quand qu’on arrive ? ».  Avec cette pluie torrentielle qui s’abat sur la route et les traditionnels bouchons de sortie de région parisienne, la réponse est : « pas tout de suite! ». Alors on s’occupe. Et on peaufine les derniers détails. Plus précisément, on prépare le fil rouge des quatre prochains jours : la stratégie de communication, décidée en amont, afin qu’un maximum de monde puisse profiter de notre aventure. Autant vous dire qu’on voit grand, des posts Facebook, des publications Instagram. Tout le monde va connaitre l’association à la fin du week-end ! (« Bon, OK, je m’enflamme un peu »).

« Mon premier post Facebook

En tout cas, un moment restera gravé à jamais : mon premier post Facebook ! Je tiens à rassurer mes proches : j’ai désinstallé l’application une fois le périple achevé.  Après plus de six heures de route, Chamonix, enfin ! Et alors ? Personne pour nous accueillir, à 23h30. Toutes les lumières sont éteintes. Tout le monde est couché. Super les potes ! On ne sait même pas quelle est la porte d’entrée… Et où sont nos chambres ? Bon, OK, demain, Fab’ prend le départ de l’OCC et tout le monde est bien fatigué par la route. Logique. On finira par trouver notre chemin jusqu’à notre lit. Ou plutôt mon matelas pneumatique ! Extinction des feux. Un peu de repos sera nécessaire pour tenir la distance.

 


L’ECHAUFFEMENT

Le suivi de Fab’ sur l’OCC peut se comparer à un échauffement. Un coureur sur une course, sur un jour, à travers deux pays. Facile, quoi ? C’est pourtant le début de cette aventure, racontée en mode « 24 heures ». 
Jeudi 30 août 2017. Très tôt le matin, trop tôt
Fab’ se réveille. Comme je dors dans le salon, sur mon matelas pneumatique,je me réveille avec lui. Il y en a qui n’ont pas chance, et qui cumulent les galères. Ici, il y en a un, et c’est moi ! Blague à part : je suis venu pour ça. Et je peux enfin dire que le coup d’envoi est lancé. Tandis que Fab’ s’active, je fais la connaissance d’Elo, qui reste bien blottie dans le fond de son lit. « C’est pas ma guerre« , comme dirait Rambo.
Je me lève avec Fab’ et je partage un peu de son petit-déjeuner. C’est quand même plus sympa de manger à plusieurs. Le temps passe vite et Fab’ est déjà sur le départ. On entend la pluie qui redouble d’intensité. Une petite photo de notre premier gazier en tenue de combat à la sortie de la maison. Et oui, je suis community manager, maintenant ! (Pour la petite historie, il n’y a pas une goutte de pluie dehors ; ce qu’on croyait être la pluie est en fait la VMC ou le frigo, on ne sait pas vraiment…).
Bref, un petit check avec Fab’ et je retourne me coucher. On se revoit à Trient. Seconde partie de nuit pour moi, j’ai un peu de mal à m’endormir. Il faut dire que l’excitation est bien présente… 
Jeudi 30 août 2017. 10h20
Nos affaires sont prêtes pour le suivi de Fab’ sur sa deuxième partie de course. On part en Mégane, avec Elo’ et Max’, direction Trient, en Suisse. Cette fois-ci, la pluie redouble d’intensité. Je me dis que le week-end va être long si le temps se maintient ainsi. En route pour Trient, on en profite pour repérer tous les autres points de passage où nous pourrons voir Fab’. C’est cool, cette fin de parcours, il y a vraiment de quoi voir les concurrents.
Jeudi 30 août 2017. 11h00
On arrive à Trient : petit village suisse de caractère. On y trouve facilement une place pour se garer et on repère un peu les lieux. Il pleut toujours. Et fort. Max’ est trempé et sort le poncho. « Il paraît que le style est parfois l’ennemi de la performance » , disent certains. Au moins, il est au sec ! On retrouve les parents de Guillaume et Mickaël, dit les « anciens ». Les coureurs de la CCC et l’UTMB, qui étaient partis chercher leur dossard, sont déjà là. C’est maintenant au tour de Fab’ d’arriver. Beaucoup d’encouragements et quelques prises de photos et vidéos. Fab’ prend son ravito et repart, nous aussi. Il est 12h00.
Jeudi 30 août 2017 : 12h30
On revient en France, à Vallorcine. Il est l’heure de manger et on trouve un petit snack qui fera l’affaire. Le snack propose une petite terrasse, le problème est qu’il pleut encore et encore. Et il fait froid, en plus ! Mais ce petit snack a tout prévu, et propose aussi des couvertures et des barnums. Pour moi, ce sera pinte de bière, burger et frites… Quoi ?! Je ne fais pas de courses ce week-end moi !
Jeudi 30 août 2017. 14h00
Fab’ passe à Vallorcine, puis au col des Montets. On le suivra jusqu’à Argentière. Il pleut toujours mais je continue mon travail de reporter et je tente des petits effets sur des vidéos. Le mec se prend pour Tarantino, quoi ?!
Jeudi 30 août 2017. 17h20
Fab’ est arrivé. Bravo mec ! Un sur cinq ! La course est lancée. Aux autres de faire aussi bien.

Début de l’assistance lors de l’OCC. Et déjà, des conditions climatiques pourries.

Jeudi 30 août 2017. 19h30
On mange, à base de riz, et on boit de la bière ! Et oui, Fab’ a terminé. Et il est bien décidé à se lâcher le bonhomme. Il enquille bière sur bière, il fume une, voire deux ou… quatre clopes, il bouffe pour trois… Bref, pour lui la course est belle et bien derrière.
Jeudi 30 août 2017. 21h00
On regarde le match de l’équipe de France, en petit comité, au moins pour la seconde période. La bière coule toujours à flot…
Jeudi 30 août 2017. 23h00
On se couche. Demain, le réveil se fera à l’aube pour accompagner les deux courageux de la CCC à le navette.
Vendredi 01 septembre 2017. 4h30
Voilà Guillaume et Benjamin qui débarquent dans ma chambre. Ma chambre ? Ah non, c’est vrai que je suis dans le salon ! Je déjeune avec eux et je les dépose à Chamonix, afin qu’ils prennent leur navette pour Courmayeur où aura lieu le départ de la CCC. Moi je retourne me coucher et je squatte le lit de Guiz, et son
duvet. 
Vendredi 01 septembre 2017. 12h00
Devinez ce que l’on mange ? Et oui, des féculents ! C’est ça de partir en week-end avec des sportifs de l’extrême. Après ça, la sieste. Même remarque que précédemment.

Une petite partie pour faire passer le temps avant le début des hostilités

Enfin le suivi !

Vendredi 01 septembre 2017. 16h00
Je dépose Benoît et Micka’ à Chamonix, d’où ils s’élanceront pour faire le « tour du caillou » comme aime l’appeler Benoît. Certainement une façon de minimiser un peu l’aventure qui les attend. En tout cas, j’aime bien l’image. Nos affaires sont prêtes et nous aussi. En vrac, on retrouvera dans le coffre : des habits, des baskets, de la bière, du pâté, des frontales, des bonnets, des gants, etc. Autant dire que la 208 est bien chargée. Ceci-dit, nous ne reviendrons pas par la maison avant demain matin, au mieux. Le choix a été fait de tirer un trait sur le départ pour se positionner un peu plus loin. Nous partons donc à quatre : Elo’, Fab’, Max’ et moi, direction un passage entre St-Gervais et Les Contamines.
Il n’y a pas trop de monde sur la route et les premiers ne sont pas encore près d’arriver. A vrai dire, ils ne sont même pas encore partis ! Du coup, on s’arrête à St-Gervais pour boire une bière en terrasse et faire quelques courses : vin rouge, chips, fromage, pain.
Vendredi 01 septembre 2017. 19h30
Le temps passe et il est l’heure de quitter Jean-Marie, qui nous a rejoints. Il nous confiera, autour d’une bière, avoir beaucoup apprécié l’ambiance du départ. Mais il n’a pas pu voir les gars, trop de monde ! Il les a aussi loupés aux Houches… Il quittera St-Gervais avant même l’arrivée de la tête de course pour être sûr d’être présent aux Contamines… Sur les cartes que j’avais imprimées, la distance entre St-Gervais et les Contamines semblait non négligeable. Pour notre part, pas besoin d’aller jusqu’aux Contamines, on bifurque avant sur la droite, direction la rivière en contre-bas. La sortie de St-Gervais est un peu galère, car des travaux sur la route alternent la circulation. Une fois cette difficulté passée (5’), on sort immédiatement de St-Gervais. Un premier virage à gauche, quelques maisons, un virage à droite, puis un autre virage à droite, et nous arrivons…aux Contamines. Merde ! On ne devait pas aller jusqu’ici, nous !
Bref, demi-tour, on se gare à l’arrache devant un gendarme (mais avec son autorisation). On sort les pulls, les k-ways, les bonnets et les frontales, pour rejoindre le point de rendez-vous. On a une petite marche de 25’ à faire, à travers le lieu-dit car le gendarme nous a refusé l’accès à la route. Les bières de St-Gervais font leur effet, et les trois mecs ont une envie de pissé.

ATTENTION ANECDOTE. Au bar, j’ai eu une idée magistrale. Je vous explique le scénario, qui n’a pas vu le jour, faute de lumière. L’idée est d’envoyer une petite vidéo marrante à Benj et les autres. Les trois mecs se mettent en ligne, en train de pisser. On est filmé de dos par Elo’ qui, après quelques secondes, lancent la sonnerie de mon téléphone avec des cloches pendant que l’on secoue la dernière goutte. Une idée de génie, tuée dans son œuf par la pénombre. Dommage.

Merci aux locaux de nous avoir prêté un parapluie !

On arrive dans le lieu-dit, et plusieurs personnes sont déjà positionnées à cet endroit. Je pensais vraiment qu’on serait seul, mais il n’en est rien. Nous sommes une petite dizaine, avec toutes les générations : des très jeunes, des adultes et des anciens. L’ambiance est bonne et tout le monde est d’accord pour dire que cette édition sera magnifique. Il se remet à pleuvoir, et les habitants du hameau nous amènent un parasol pour nous abriter. Quand je vous dis que l’ambiance est bonne. En attendant les premiers, on fait quelques tests de lumière : « ou comment se prendre pour une star de l’ultra-trail ».
Ça y est la tête de course arrive. Jim Walmsley est en tête et très souriant. A quelques minutes, le groupe de chasse arrive à son tour. Trois hommes le composent, avec Kilian Jornet, Xavier Thévenard et François D’Haene, ce dernier menant déjà l’allure. S’en suit un serpent, d’abord parsemé puis continu, de frontales à travers la nuit. Et bientôt, nos gaziers. On fait vingt mètres avec eux, une petite photo, un échange d’impressions, et ils repartent. Mais ça fait plaisir de les voir, et ils ont la banane.

Une petite photo avant de laisser filer Mickaël et Benoît vers La Contamines

Vendredi 01 septembre 2017. 22h00
On reprend la voiture pour repartir sur la CCC où Guillaume et Benjamin avancent bien.
Vendredi 01 septembre 2017. 23h00
On arrive à Vallorcine. On retrouve les parents de Guiz qui sont là, eux aussi. On va se garer dans le parking souterrain pour être un peu protégé du froid et de la pluie. On va enfin pouvoir se poser pour manger. On déballe tout, la 208 se transforme en table, les poteaux en tire-bouchons, les sacs de couchage en couvertures. Après manger, je retrouve mon frère qui est ici, lui aussi, pour suivre son meilleur pote. Suiveur, une histoire de famille chez les Chauveau ? Pour l’UTMB 2017, on peut dire que oui.

La Cucaracha à fond dans Vallorcine

Samedi 02 septembre 2017. 01h00
On reprend des bières et on va se poster au début de cette longue ligne droite de Vallorcine. Ça y est ! Enfin le 2 septembre ! On sera les premiers à souhaiter l’anniversaire de Guiz. Il ne pleut plus mais l’atmosphère est humide et il ne fait pas chaud. Du coup, on décide de former le premier groupe mexicain à se produire à Vallorcine. Notre hit, et seul titre : « La Cucaracha ». Ça nous aura quand même fait patienter trente minutes. Guiz arrive, on court avec lui, on lui chante une chanson. Seulement, on n’insiste pas pour trinquer avec lui car on voit que c’est dur : la nuit, le froid, la distance, le dénivelé… 

Samedi 02 septembre 2017. 02h00
On arrive à Trient, où Benjamin ne devrait plus tarder à arriver. On fait le tour de la zone de ravitaillement pour être sûr qu’il ne soit pas déjà là. En passant devant la salle des abandons, le bénévole nous demande : « Vous cherchez quelqu’un ? » « Oui, mais ça ne m’est même pas venu à l’idée de le chercher dans les abandons ! » Je demande à un autre s’il a passé le point de passage. Elle me répond par la négative. Nous nous mettons, Elo, Fab’ et moi, à chercher ses parents. Depuis la petite église, je les aperçois en contre-bas, mais je ne suis pas sûr que ce soit eux. Je crie alors : « La famille Plessis est demandée ! » . Nicole se retourne, en stress, et commence à venir vers nous d’un pas décidé et certainement inquiète. Je réalise à ce moment que ce n’était pas la meilleure idée de les appeler ainsi.
Samedi 02 septembre 2017. 02h40
Benj’ arrive à Trient. Il prend son temps pour bien se ravitailler. Alain fait un parfait assistant. Le ravito de Trient commence à devenir un peu n’importe quoi. Deux mecs sont en train de faire un bras de fer sur le comptoir, un autre fume un cigare sous la tente. Normal ! Nicole commence à devenir inquiète. Elle n’a pas l’habitude de voir son fils dans cet état. C’est vrai que l’on voit que ça commence à être dur. Je lui propose de faire un petit bout de chemin avec lui. Ca me chauffe, et il accepte. Super ! Et on est parti, en pleine nuit… Je lui parle beaucoup, de tout et de rien. De la journée qu’on a passée, des élites à St-Gervais, de l’avancé des gars sur l’UTMB, de celle de Guiz aussi. Souvent, je lui pose des questions pour m’assurer de ne pas marcher trop vite. Ok, le mec est dans le dur, mais il n’est pas là pour acheter du terrain. Parfait.

Alain – Nicole, un autre duo de suiveurs.

Samedi 02 septembre 2017. 03h40
Ça fait un peu de temps que je monte avec Benj’. Il est temps de le laisser et de redescendre retrouver mes acolytes qui sont venus me rechercher à Trient. Je les retrouve en bas, après une descente bien rapide et de nuit. Je me suis juste arrêté à chaque concurrent croisé. Priorité aux gars en course et toujours un petit mot pour les encourager. Je ne suis pas un sauvage tout de même.
Samedi 02 septembre 2017. 04h00
On repart à Vallorcine. Quand j’ai quitté Benj, il était quand même bien dans le dur. Du coup, une fois à Vallorcine, je décide de remettre la frontale et de partir à sa rencontre. Je tomberai sur lui au détour d’un virage. On descendra ensemble. C’est lui qui ouvre la route. Il faut qu’il ait le champ libre pour appréhender les appuis et surtout descendre à son rythme. Et il descend bien le bougre ! Enfin, jusqu’à ce qu’il arrive au cul d’un groupe ou même d’un gars tout seul. Et là, rien ! Il reste gentiment derrière. Je l’encourage à les doubler. Il en est capable. Il m’écoute et on descend super bien.

Un petit massage des jambes

Samedi 02 septembre 2017. 06h30
On arrive au ravitaillement de Vallorcine. Les parents de Benjamin sont toujours là, tout comme Elo’, Fab’ et Max’. Benj m’a dit dans la descente qu’il commençait à avoir mal aux jambes et que la nuit était dure. Je demande à Alain en arrivant si ça ne le dérange pas que je fasse son ravitaillement. Il accepte sans problème. Je propose à Benj de s’installer vers tout le monde et je me charge de lui apporter tout ce qu’il faut. Il voit des boîtes de pizza sur une table à côté. Il en aurait bien mangé le bonhomme ! Je lui recharge la poche d’eau, les gourdes. Je lui fais aussi un petit massage des jambes, surtout pour les dégourdir et les relâcher. Il est temps qu’il reparte, et je repartirai avec lui, pour faire le chemin jusqu’au col des Montets. 
Samedi 02 septembre 2017. 07h55
Passage au col du Montets. Cette heure trente de marche m’a paru tellement courte. Le lever du soleil, les montagnes qui nous entourent qui apparaissent. Et les discussions, interviews, photos, vidéos de Benj’ ont bien aidés. Max’ est là pour me récupérer. Il a fait un petit aller-retour à la maison pour déposer Fab’ et Elo’, qui commençaient à dormir dès Vallorcine. On dit donc au revoir à notre guerrier de Benj’ et on lui dit de kiffer à l’arrivée. Cette ligne d’arrivée qu’a franchie Guiz depuis près de 2 heures et qui porte à deux sur cinq le nombre de finishers.
Pour nous, c’est direction Courmayeur pour retrouver Benoît sur l’UTMB. C’est Max qui conduit. Il faut que le tunnel se passe bien, sinon, ça va être juste d’arriver à temps. Personne à l’entrée du tunnel. Tant mieux. Dans le tunnel, les lumières, les lignes au sol, la vitesse, tout ça me berce et m’hypnotise. Je suis à deux doigts de m’endormir. Heureusement que je ne conduis pas. Passage du côté italien pour la première fois. Et il fait beau, c’est cool. Il nous faut un peu de soleil pour recharger les batteries.
Par contre, aucune indication pour nous indiquer où est situé le ravitaillement à Courmayeur. Et le temps presse. On gare la voiture et on verra bien. On pose la question à des coureurs qui nous disent que le site est à près d’un kilomètre. Et Ben qui m’appelle pour me dire qu’il arrive. Allez, on court pour y être le plus vite possible. Une petite descente et voilà Max qui tape un sprint pour me passer devant et faire le malin ! Je ne peux pas suivre, il est trop fort pour moi…(C’est bon Max, j’ai bien retranscrit la vérité ?).

J’en peux plus de ces Italiens ! »

Samedi 02 septembre 2017. 08h40
J’accède à la zone de ravitaillement et je retrouve un Benoît en pleine forme qui a déjà quasiment tout fait. Il laisse rien au hasard celui-ci. On discute un peu de sa nuit et de la mésaventure de Micka’. Je lui donne des infos sur Benj’ et sur Guiz. Moins de quinze minutes et il repart. On fera dix avec lui dans Courmayeur pour retourner à la voiture. Il est vraiment bien, il court, il monte les marches à bonne allure. C’est de bon augure pour la suite. On se quitte et se donne rendez-vous à Champex, en fin de journée.
Max et moi allons prendre un petit déj’ dans un bar de Courmayeur. On a vraiment besoin d’un café et en plus, on est en Italie. Il fera vraiment du bien ce petit café. On retourne ensuite à la zone de ravitaillement mais cette fois-ci en voiture. Il n’est pas question de me faire ridiculiser deux fois de suite de cette descente ! On avait dit à Jean-Marie d’attendre là-bas et qu’on le rejoindrait. Alors quelle surprise quand Micka nous appelle en disant « Mais vous êtes où putain ! Et mon père, je n’arrive pas à le joindre ! »

En Italie, café obligatoire !

Samedi 02 septembre 2017. 10h10
On arrive sur la zone de ravitaillement. Jean-Marie est avec Micka dans le gymnase. Nous les attendons dehors. L’attente me parait durer une éternité. La fatigue commence à se faire sentir et ce speaker italien qui nous crie dans les oreilles. J’en peux plus de ces Italiens !
Micka sort au bout de trente minutes. Il s’arrête vers nous, on discute. Il a l’air remonté à bloc mais encore un peu dans le pâté par rapport à sa mésaventure de la nuit. Toujours est-il qu’il repart avec le sourire et l’envie d’aller au bout. Go Micka !
Samedi 02 septembre 2017. 11h00
On retourne en France. Ça va être juste de voir l’arrivée de Benj. Surtout qu’il y a un monde fou pour passer le péage d’entrée dans le tunnel. Dommage. Du coup,  on rejoint tout le monde à la maison où Benj est rentré, portant à trois sur cinq les finishers de 100% Trail. On prend l’apéro pour fêter ça et tout le monde est motivé pour aller voir l’arrivée de M. François D’Haene. L’arrivée ou plutôt un peu avant, de peur d’avoir beaucoup trop de monde place du Triangle de l’Amitié.
Samedi 02 septembre 2017. 13h50
François D’Haene passe devant nous, à vive allure après plus de 160 kilomètres de course. Les trais sont tirés mais pas tant que ça. Je lui tends la main, un peu à l’arrache, pour qu’il tape dedans. Il n’en fera rien. L’enf…, il m’a mis un gros vent ! Tant pis, M. François D’Haene est devenu ce c.. de D’Haene ! Je plaisante. Un grand, très grand monsieur du trail. Kilian passera 15 minutes plus tard. Il a également une belle foulée mais son visage est beaucoup plus marqué. Il faut dire qu’ils n’ont pas la même morphologie ces deux-là.
Et si on allait manger ? C’est parti, pizza pour tout le monde. Fini les pâtes, le riz. Place au gras !

Une pizza, et ça repart !

Samedi 02 septembre 2017. 17h00
Après 2h de sieste, réveil en speed en se disant qu’il faut vite partir pour voir Benoît à Champex. Un coup d’œil à Live Trail et on se rend compte que l’animal avance à une vitesse folle. Plus d’une heure d’avance sur sa prévision. On n’y sera jamais. On tente quand même. Les suiveurs se divisent en deux. Max’ et moi suivront Benoit. Fab’ et Elo’ suivront Micka’.
On arrive à peine à Trient que Benoît appelle depuis Champex. « Vous êtes loin ? » « Euh… Oui » . Tant pis, il se débrouillera. Il est fort. Mais fait chier. Vraiment chier. 10h qu’on l’a vu et la prochaine fois, ce sera dans 3h30.

« Quand Max’ casse son PEL »

Samedi 02 septembre 2017. 18h00
On s’arrête au col de la Forclaz avec Max. Il se fait soif. Mais on n’a pas envie de boire de bière. On est malade ? Pas encore, mais on est fatigué, c’est sûr. Alors on va boire un coca dans le café du coin. On est en Suisse, autant vous dire que Max a cassé son PEL pour nos deux cocas. Benj’ et Guiz nous rejoignent et on se remet à boire une… bière en attendant !
Samedi 02 septembre 2017. 20h50
Benoît arrive au col de la Forclaz, j’ai fait quelques mètres en remontant le parcours. Je crois qu’il est étonné de me retrouver là, puis déçu que ce ne soit pas encore Trient. Il faut dire qu’il fait encore et toujours un temps exécrable ! 
Samedi 02 septembre 2017. 21h15
Benoît arrive à Trient. Je suis chargé de faire son ravitaillement. Je lui demande ce qu’il veut. La classique : soupe, fromage, saucisson. Et il veut être dans la salle avec tout le monde. Est-ce le contrecoup de près de 12h passé seul sur les sentiers ? Est-ce une conséquence de notre absence à Champex ? C’est peut-être tout simplement que tous ces potes sont là et qu’il veut profiter d’eux. Beaucoup d’échanges avec les finishers pour glaner quelques infos sur la fin du parcours. Pour ma part, pas grand-chose à faire, à part lui changer les piles de la frontale (ça devait être fait à Champex, ça aussi !). Bref, ce mec est très organisé et ne laisse pas grand-chose au hasard. Vingt minutes de pause, et il repart.

Ecouter, anticiper, comme toujours

Samedi 02 septembre 2017. 21h35
J’ai proposé à Benoît de l’accompagner, lui aussi, à la sortie de Trient. J’ai donc raccroché la frontale sur la tête et je retourne arpenter les sentiers de la course. Cette fois-ci, je laisse Benoît mener le train. Il n’a pas besoin de lièvre lui, juste d’un peu de compagnie. Alors je lui raconte nos deux jours,l’arrivée des élites, quelques anecdotes. Mais pas toujours facile de parler, car il avance bien le gazier. Et encore, il ne pousse presque pas sur les bâtons (c’est ça quand tu n’as pas de bras).

« Place à la raclette »

Le parcours est le même que celui fait dans la nuit précédente avec Benj’ mais le rythme n’est pas le même. Avec Ben, pas de pause, ça monte au train. L’homme aime le vélo est ça se voit. Quelqu’un est plus lent, il double. L’important, c’est de garder le rythme. Résultat, je le laisse au même endroit que Benj’ mais en moitié moins de temps. La redescente est, elle aussi, plus rapide, car il y a moins de coureurs. On est dans le top 300 de l’UTMB. Mais à chaque coureur, toujours des applaudissements et un petit mot. Ils sont tous ravis de voir un mec au milieu de nulle part, et au milieu de la nuit en train de les encourager. J’arrive à Trient et personne dans la voiture. Je regarde mon téléphone et je vois un message : « on mange au ravito« . En arrivant, une raclette m’attend. Parfait !

Dimanche 03 septembre 2017. 00h00
Benoît arrive à Vallorcine. Là aussi, je suis allé le chercher au pied de la descente. Je ne remonte pas plus car il ne voulait pas être accompagné dans la descente. Rien n’est laissé au hasard. Un accompagnateur, en descente, c’est risqué une blessure. Je comprends Ben. En plus, il n’a pas trop le droit d’être accompagné. Pas de place au hasard, je vous dis. Je sais que ce mec aime les challenges, et qu’il a fait une très belle préparation. Alors j’essaye de repérer les coureurs qui sont devant lui : état de forme, nombre, écart. Ça peut être des informations utiles pour gérer la fin de course.
Je laisse le ravitaillement de Vallorcine à Max’. Nous étions deux à suivre et il n’y a pas de raison que je sois le seul à profiter de cet instant spécifique de l’assistance. Je me contente de prendre des photos et donner les informations que j’ai collectées. Benoît a toujours le sourire, mais je le sens moins en forme, plus pensant, moins dans le ressenti. Il repart avec Max. On le retrouvera au col des Montets.
Dimanche 03 septembre 2017. 01h00
Voilà Benoît qui passe au col des Montets. Dernier passage avant l’arrivée où nous pourrons le voir. Devant lui, une montée galère en pleins milieu de sa seconde nuit de course. Il y a un groupe de cinq coureurs à quelques secondes devant lui. Je l’informe de cela. Il m’envoie chier. Il est dans le dur et il faut que ça sorte. Pas de problème, ce n’est pas contre moi. Enfin je crois ?! Il continue et on lui donne rendez-vous sur la ligne à Chamonix. « Ce n’était pas contre lui. Il le sait. Enfin je crois ?! » Bien sûr que c’est ça, Benoît m’appelle, on balaye les doutes et tout va bien.
Retour à la maison pour se reposer un peu. Je squatte le clic-clac, j’ai besoin de repos, je suis cramé. On dort moins de 3h et le réveil sonne pour pouvoir assister à l’arrivée de Ben. Au réveil, j’ai la gorge défoncée, les yeux qui piquent et encore pleins de trucs. Mais je ne vais pas me plaindre. Il y en a qui sont dehors dans le froid en train de faire l’UTMB.

« Beaucoup d’émotions, même pour un suiveur »

Dimanche 03 septembre 2017. 04h00
Toujours avec mon acolyte Max, on remonte le parcours de l’arrivée pour faire le dernier kilomètre et demi avec Benoît. Un kilomètre et demi, c’est 6 minutes quand tu fais un semi-marathon. A la fin de l’UTMB, ça peut durer très très longtemps. Mais Ben est un guerrier. Il a mal partout mais il continue de courir. Il a une chose en tête, arrivé avant 4h30. Et il réussira haut-la-main. Son arrivée est intimiste, pas de public qui frappe sur les pancartes, pas de speaker qui scande son nom. Mais l’essentiel est là, la ligne, la performance et les amis qui sont au bord. Ça fait quatre sur cinq.
On retourne à la maison où Ben fera la fête aux morceaux de pizza qu’on avait laissés. On se recouche pour presque une vraie nuit. 5h de sommeil, c’est à ça que ça ressemble !!!
Dimanche 03 septembre 2017. 11h30
On retourne sur la ligne d’arrivée pour accueillir le dernier gazier de 100% Trail Angers. Celui qui va nous permettre de faire un carton plein, un 100%. Cette fois-ci, l’ambiance est monstrueuse. Des coureurs qui arrivent exténués mais délivrés. Des coureurs de la PTL, de l’UTMB. Tous ont la banane malgré la douleur. Beaucoup d’émotions, même pour un suiveur ! Et voilà notre Micka, en blanc, le sourire jusqu’aux oreilles et le téléphone à la main pour ne pas louper une miette de cette arrivée qu’il attendait depuis longtemps. La suite, vous la connaissez. Des bières, des amis, une raclette, des amis, des souvenirs, des amis encore plus amis !

Photo de famille

Le mot de la fin

Voilà comment j’ai vécu le suivi et l’assistance de l’UTMB. Pour tous ceux qui se posent ces questions :

  • Est-ce qu’on garde des souvenirs à suivre une course ?
  • Est-ce que ce n’est pas un peu ennuyant ?
  • Est-ce que ce n’est pas un peu frustrant ?
  • Est-ce que les émotions sont là ?

A tous ces gens, j’espère vous avoir apporté des réponses. Je savais que cette édition serait terrible, mais elle a dépassé tout ce que je pouvais imaginer. Bien sûr que le trail me manque, mais je crois que j’ai besoin de faire autre chose avant d’y revenir vraiment. Pour moi, l’abandon au GRP n’est pas oublié. Et seul le temps et d’autres belles compétitions me permettront de revenir cette fois-ci aux côtés de mes potes sur un ultra. Bravo à tous, les coureurs, les suiveurs, sur place ou à distance. Tout le monde à sa part de responsabilité dans ce 100%. Et encore bravo, à tous ceux qui ont tout lu…


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2 Comments

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